A la croisée des sciences du langage et de la didactique du français langue étrangère (FLE), cette recherche doctorale s’intéresse à l’enseignement de la grammaire et à la transposition d’une catégorie fondamentale et complexe de la langue française : le verbe. Nous cherchons à décrire et à analyser, de manière écologique et compréhensive, les pratiques grammaticales de l’enseignant de FLE aux prises avec les propriétés morphologiques, syntaxiques, lexicales et énonciatives de la catégorie verbale en français. Le terrain de la recherche est composé de trois enseignantes de FLE exerçant dans un centre de langue universitaire en France. Nous avons recueilli des observations de classe (niveaux A2 et B1.1) incluant l’enseignement de temps verbaux. Outre la mise au jour des trames d’enseignement, les synopsis de classe ont permis le découpage d’extraits significatifs qui révèlent les gestes didactiques des enseignantes et sur lesquels ces dernières ont été invitées à mettre des mots par le biais d’entretiens d’autoconfrontation afin de faire émerger les motifs de l’action didactique et les obstacles rencontrés. Après avoir brossé le portrait du verbe du point de vue de la linguistique, de l’acquisition et de la didactique, nous montrerons que les pratiques grammaticales des enseignantes s’inscrivent dans une tradition écrite du traitement morpho-verbal et que la mise au jour des emplois du temps verbal est au cœur d’une pratique grammaticale à haut risque. Des préconisations pour l’enseignement du verbe en FLE seront finalement formulées.
Mots-clés : ENSEIGNANT DE FRANÇAIS LANGUE ÉTRANGÈRE, PRATIQUE GRAMMATICALE, VERBE, GESTES DIDACTIQUES, SYNOPSIS, AUTOCONFRONTATION
Les traitements chirurgicaux des cancers du larynx induisent des séquelles vocales importantes. Ces dernières peuvent être compensées par une rééducation orthophonique, cependant, certains patients conservent une plainte concernant non pas leur voix, mais leur parole. Les paramètres du timing de la parole tels que le débit de parole ou encore la vitesse articulatoire sont impactés par la chirurgie. La littérature est abondante en ce qui concerne les séquelles vocales après laryngectomies partielle ou totale ; en revanche, l’altération de la parole après ces chirurgies n’a été que peu étudiée. Partant d’un constat clinique – celui de la plainte de nos patients- nous avons entrepris d’étudier certains composants de la parole.
La théorie de la variabilité́ adaptative de la parole développée par Lindblom, précisée par le modèle hypo/Hyper speech, a servi de base à notre travail. Les patients opérés du larynx souffrent d’une grande difficulté́ à initier et maintenir le voisement au cours de la parole. Nous avons émis l’hypothèse qu’ils adaptent leur façon de parler en ayant recours à une stratégie d’hyper-articulation ; modifiant la parole au point d’engendrer la diminution, voire la disparition, de certains phénomènes normaux, comme la coarticulation. Les sujets, procédant alors à une véritable ré-organisation temporelle de leur parole, produiraient des patterns rythmiques anarchiques responsables du caractère peu naturel de leur parole.
Six expérimentations ont été réalisées en deux phases distinctes afin de répondre à nos hypothèses. La première phase a mesuré́ la coarticulation au sein d’une population de sujets opérés d’une laryngectomie partielle (LP) et d’une population de sujets opérés d’une laryngectomie totale (LT). Les résultats ont montré́ une diminution de la coarticulation après LP, et sa disparition après LT. La deuxième phase expérimentale portait sur une nouvelle population de sujets LT. Les paramètres du timing de leur parole tels que les pauses, le débit de parole et la vitesse articulatoire, ont été étudiés. Ces paramètres ont ensuite été corrélés à l’évaluation perceptive et objective des voix. Une grande quantité́ de pauses, responsable, entre autres, de l’absence de coarticulation et d’un jugement perceptif négatif, ont été mis en évidence.
Ces travaux confirment les modifications de la parole engendrées par la chirurgie laryngée et l’intérêt de les étudier.
Pour comprendre un énoncé ironique, il nous faut différencier ce que le locuteur dit de ce qu’il veut signifier en intégrant les différentes informations contextuelles à notre disposition (Grice, 1975 ; Searle, 1978).
Ce travail de thèse a eu pour vocation, en utilisant le cadre du modèle de Satisfaction de Contraintes, de déterminer, pour la première fois en français, le rôle joué par plusieurs types de contraintes (i.e., pragmatiques, linguistiques et socioculturelles) dans la compréhension des critiques et des compliments ironiques.
Suite à une première étude, nos résultats ont mis en évidence que l’incongruité entre le contexte et l’énoncé était un indice plus fort que la prosodie lors de la compréhension de critiques ironiques. Les résultats des études suivantes ont confirmé le rôle majeur des contraintes pragmatiques (i.e., allusion à une attente déçue, tension négative et présence d’une victime) dans l’interprétation des critiques ironiques et ont montré la contribution, bien qu’à un niveau moindre, de contraintes socioculturelles dans la compréhension des critiques et des compliments ironiques. Ces résultats nous ont aussi permis de confirmer l’asymétrie de l’ironie et de montrer que les contraintes pragmatiques contribuant à la compréhension des compliments ironiques seraient différentes de celles contribuant à la compréhension des critiques ironiques.
Au-delà des symptômes cardinaux qui caractérisent la maladie de Parkinson (MP) – tremblement, akinésie, et rigidité – des déficits rythmiques se manifestent dans différents domaines de coordination motrice, comme au niveau du membre supérieur, de la sphère oro-faciale, ou de la marche. Des altérations rythmiques sont également mises en évidence sur des tâches de perception de rythme (i.e., sur des tâches n’impliquant pas de production motrice). Face à l’étendue des dysfonctionnements rythmiques dans la MP, l’hypothèse d’une dysrythmie généralisée a été formulée. Cette hypothèse implique que l’ensemble des altérations rythmiques qui s’observent au travers de diverses tâches et dans différents systèmes effecteurs partage des mécanismes causaux communs. Néanmoins, cette proposition n’a pas été confirmée à ce jour, et nombre de questions demeurent, tant sur le plan théorique que clinique : les déficits rythmiques caractéristiques de la MP sont-ils réellement liés ? Une source commune aux manifestations rythmiques déficitaires est-elle envisageable ? Si tel est le cas, quels en sont les corrélats cérébraux, et les retombées cliniques ? Elaborée autour de deux principaux axes de recherche, cette dissertation avait pour objectif principal de tester l’hypothèse d’une dysrythmie généralisée dans la MP, au travers de deux questions : i) existe-t-il des liens entre trois domaines de production rythmique (i.e., coordinations oro-faciale, manuelle, et de marche) et un domaine perceptif dans la MP ?; et ii) quel est l’impact d’un entraînement rythmique d’un domaine moteur (i.e., coordination rythmique manuelle) sur d’autres domaines de coordination motrice (i.e., oro-faciales et de la marche) ? L’ensemble des résultats confirme l’hypothèse d’une dysrythmie généralisée dans la MP, et l’existence très probable d’altérations de mécanismes en lien avec une fonction prédictive générale qui, lorsqu’elle est la cible d’un entraînement rythmique, pourrait permettre de réduire certains troubles moteurs dans la MP.
Laboratoire Parole et Langage, salle de conférences B011, 5 avenue Pasteur, Aix-en-Provence
Aurélie Goujon
(LPL-AMU)
Indices d’incompréhension et séquences de réparation dans l’interaction en face-à-face : une analyse multimodale
Sous la direction de
Marion Tellier et Roxane Bertrand
Résumé Peu d’études jusqu’à présent se sont intéressées à l’interlocuteur et à l’impact que celui-ci peut avoir sur la production langagière du locuteur principal. Or, l’interaction est un processus collaboratif et n’examiner qu’un des partenaires ne permet pas d’en saisir le processus global, ni les mécanismes qui sous-tendent la production verbale et gestuelle en contexte social.
Dans ce travail, nous nous intéressons aux mouvements de sourcils dans l’interaction en face-à-face en tant que ressource utilisée par les participants pour signaler un problème de compréhension. Notre objectif est de décrire la séquence interactionnelle dans laquelle apparait ce mouvement et les trajectoires interactionnelles dont use le locuteur pour résoudre le trouble de la compréhension qui a surgi.
Nous utilisons les outils qu’offrent la linguistique interactionnelle et la linguistique de corpus, pour mener une analyse systématique de ces phénomènes. Nous nous appuyons sur trois corpus présentant différents degrés de spontanéité et diverses activités interactionnelles. Après avoir identifié et annoté les mouvements de sourcils (haussement et froncement) et les séquences présentant un problème de compréhension (Weigand, 1999 ; Antaki, 2012), nous avons mené une analyse séquentielle sur une soixantaine d’extraits.
Cette recherche met en lumière le rôle des mouvements de sourcils en tant que ressource qui participe à rendre mutuellement reconnaissable un problème de compréhension, mais également en tant qu’indice de désalignement et de réalignement lors de ces dîtes séquences. De plus, nous évaluons les technologies permettant la détection automatique des mouvements de sourcils au travers de comparaisons entre les annotations manuelles et automatiques. Ce travail permet de mieux comprendre les mécanismes de l’interaction sociale dans toute la complexité multimodale qu’ils impliquent.
Alexia Mattei, praticienne hospitalière dans le service ORL de la Conception et nouveau membre du LPL depuis 2019 (équipe POP), soutiendra sa thèse d’exercice le vendredi 5 avril 2019 à la faculté de la Timone en salle de thèse 2 (1er étage) à 18h15.
Celle-ci porte sur « La fraction vasculaire stromale autologue d’origine adipeuse dans le traitement des lésions cicatricielles des cordes vocales » (ou en simplifié La thérapie cellulaire en laryngologie !).
soutiendra sa thèse de doctorat en sciences du langage intitulée
« Les énoncés non-phrastiques en français oral, une analyse intégrant les niveaux syntaxique, sémantique et interactionnel »
Le jeudi 13 décembre 2018 à 14h00
au Laboratoire Parole et Langage (salle B011)
Membres du jury
Myriam Bras, Université Toulouse Jean Jaurès (Rapporteur)
Jonathan Ginzburg, Université Paris Diderot (Rapporteur)
Cristel Portes, Aix-Marseille Université (Présidente)
Laurent Prévot, Professeur, Aix-Marseille Université (Directeur)
RÉSUMÉ
Les énoncés non-phrastiques, en tant que phénomènes particuliers de l’oral, intéressent l’ensemble des niveaux linguistiques mais leur étude n’avait encore jamais abouti à une classification pour le français. Dans nos analyses portant sur des données orales semi-spontanées, nous nous sommes concentrés sur les niveaux syntaxique, sémantique et interactionnel, avec comme objectif d’établir une classification articulant leurs formes et leurs fonctions. La consultation des travaux abordant les phénomènes averbaux et non prédicatifs a mené à une étude comparative des typologies et taxonomies existantes traitant des phénomènes non-phrastiques de l’anglais et de l’espagnol, avec pour résultat une grille d’analyse inclusive de critères des trois niveaux d’analyse choisis. Notre étude de corpus de ces phénomènes a débuté par l’extraction objective et la sélection des séquences non-phrastiques au sein de trois corpus existants (CID, MapTask-AIX, DVD). L’analyse du jeu de données à l’aide du cadre de la macrosyntaxe a permis la classification des séquences en catégories syntaxico-discursives. L’étude des indices d’intégration syntaxique de nos séquences ainsi que leur deux modes syntaxiques d’intégration au contexte, l’ajout et le remplacement, a confirmé notre hypothèse concernant le pouvoir de désambiguïsation limité du niveau syntaxique. L’ examen des indices sémantiques et pragmatiques d’intégration a abouti à l’identification de trois modes sémantiques d’intégration des énoncés non-phrastiques à leur source: la redondance, l’ajout et le remplacement. L’identification et la caractérisation de relations fonctionnelles d’ordre sémantique et interactionnel reliant les énoncés à leur source a permis de constituer un inventaire systématique des fonctions. La dernière étape de notre travail, qui synthétise les analyses menées, comporte une typologie des énoncés non-phrastiques constituée de quatre types : les prophrases simples ou à topique contrastif et les fragments à source linguistique ou extralinguistique. Elle comporte également notre classification articulant les modes d’intégration sémantique et les fonctions des énoncés non-phrastiques. Enfin, nous présentons un modèle d’interprétation ainsi qu’un modèle d’intégration applicables à tous les types d’énoncés non-phrastiques.
Ally YUSUFU
« L’éveil aux langues » pour la construction d’une société plurilingue et solidaire : le cas de l’archipel de Zanzibar
14 décembre, 14h, salle DUBY, MMSH, Aix
Jury
Christian OLLIVIER, PR, ICARE-EA 7349 – Université de La Réunion (rapporteur)
Marielle RISPAIL, PR émérite, Université J. Monnet-St Etienne, CELEC-EA 3069 (rapporteure)
Patricia LAMBERT, PR, Ecole Normale Supérieure de Lyon-IFE, ICAR – UMR 5191
Médéric GASQUET-CYRUS, MCF, AMU, LPL
Sylvie WHARTON, PR, AMU, LPL (directrice de thèse)
L’ « éveil aux langues » consiste à amener les élèves à comparer le fonctionnement de plusieurs langues dans une même activité didactique. Les projets Evlang et Janua Linguarum menés dans le contexte européen ont mis en évidence les impacts positifs de cette approche dans le développement de la compétence métalinguistique et des représentations et attitudes d’ouverture à la diversité culturelle. Dans un contexte non européen et fortement multilingue et multiculturel marqué par des phénomènes de minoration sociolinguistique et par des tensions et divisions sociales nombreuses, la contribution, à Zanzibar, de l’Eveil aux langues dans la construction d’une société solidaire implique de contextualiser et d’adapter cette démarche. Une expérience dans des classes expérimentales et des classes témoins a été menée auprès d’élèves d’une école primaire publique (2015-2018) et a permis de révéler l’ intérêt et la faisabilité de l’Eveil aux Langues à Zanzibar. In fine, cette recherche interroge le rôle d’un aménagement didactique dans la perspective d’un aménagement sociolinguistique.