Cette thèse porte sur les sourires dans les transitions thématiques de conversations. Ces moments charnières entre deux thèmes font particulièrement intervenir la collaboration des participants. Ainsi, nous avons étudié le rôle du sourire en tant que ressource mobilisée dans cette collaboration : les sourires étant des expressions faciales très fréquentes mais peu étudiées dans leur rapport avec l'organisation de l'interaction. Parallèlement, nous avons étudié l'effet de la relation des interactants sur cette collaboration.
Pour explorer ces questions, 40 interactions des corpus CHEESE! et PACO ont été étudiées. Dans le premier corpus, les participants se connaissent bien alors que dans le second ils se rencontrent pour la première fois le jour de l’enregistrement. Les sourires des interactants ont été annotés selon l'échelle du Smiling Intensity Scale. Grâce à l'outil de détection automatique des sourires SMAD, développé pour les besoins de cette thèse, nous avons mené une analyse fine du déploiement des trois intensités de sourires.
Nos analyses ont consisté à articuler deux approches complémentaires : celles de l'Analyse Conversationnelle et de la Linguistique Interactionnelle via des analyses séquentielles ainsi que l'approche de la Linguistique de Corpus qui a consisté à interroger quantitativement nos données.
Cette méthodologie a permis de dégager trois résultats principaux concernant les transitions par rapport à des moments aléatoires des conversations étudiées. (1) Les phases des transitions sont caractérisées par des procédés spécifiques, pour certains invariants quelle que soit la relation des participants. (2) Lorsque le locuteur propose un nouveau thème, une suppression du sourire est plus fréquemment observée. (3) Lorsque l'interlocuteur accepte la proposition thématique il est plus enclin à augmenter l'intensité de son sourire. Cette thèse montre que le sourire est une ressource mobilisée par les interactants lorsqu'ils effectuent des transitions thématiques. A ce titre, cette thèse s'inscrit dans la lignée des travaux plaidant pour une prise de compte du sourire comme ressource à prendre en compte dans l'analyse multimodale des interactions.
Chargé de Recherche CNRS, Laboratoire Parole et Langage
11 mars 2022 à 10h30 au Grand amphi, Campus St. Charles, 3 place Victor Hugo, Marseille
Dans le cadre de la Journée ILCB le 11 mars de 9h30 à 17h
Titre HDR : “Towards an Integrated Brain Language Model — The spatiotemporal dynamics of production versus perception”
Jury :
Sonja KOTZ, Maastricht University (rapporteure)
Benjamin MORILLON, Aix-Marseille Université (rapporteur)
Noël NGUYEN, Aix-Marseille Université (tuteur)
Martin PICKERING, Edinburgh University (rapporteur)
Rasha ABDEL RAHMAN, Humboldt-Universität zu Berlin (examinatrice)
Résumé :
The capacity of communicating through language has been instrumental in the evolution of our species. Being able to quickly alert our peers of an upcoming danger has high biological relevance, and the ease and speed with which we can use language has made this our primary communicative tool. Not surprisingly, understanding the fundaments of this ability has been a central issue throughout the history of human and social sciences. By now, our knowledge about the representations and processes underpinning language behaviour is impressive and thanks to the combined efforts of linguists, psychologists and neuroscientists, detailed neurolinguistic models of language production and perception have been developed. Despite the huge advances made to understand this complex capacity of the human mind, language research has been typically modality-specific, with a dissociation between production and comprehension in terms of research strategies, paradigms and models. The objective of the research I present here for my HDR project is to explore the nature of linguistic representations and processes from an integrated perspective. This is important, because in order to fully understand language processing and develop a neurolinguistic model that explains behavior, we’ll need to understand how production and perception interact. This HDR aims at contributing to this endeavor by comparing the spatiotemporal dynamics of production and perception for the basic building blocks of language: words. In doing so, I want to address the question of whether and how word representations and their processing overlap in time and space in the speaker and listener’s minds.
Cette thèse s’inscrit dans une approche « cognition incarnée » qui considère la mémoire comme un système unique à traces multiples, capable de simuler les composantes sensorimotrices et émotionnelles des expériences passées afin de former les souvenirs et les connaissances (Barsalou 2003, 2008). L’objectif est de savoir si les personnes âgées activent la composante motrice lorsqu’ils accèdent à une connaissance et, dans l’affirmative, si le fait de l’avoir activée facilite la reconnaissance ultérieure de cette connaissance. Trois expériences conduites impliquaient deux groupes expérimentaux des personnes vivant en EHPAD et souffrant de pathologies neurodégénératives (groupe 1 – âge moyen 75 ans et groupe 2, âge moyen 90 ans) ainsi qu’un groupe contrôle vivant à domicile (âge moyen 75 ans). Deux expériences utilisant un paradigme d’amorçage sensorimoteur étaient proposées afin d’examiner l’effet de l’amorçage moteur et taxonomique sur la tâche de catégorisation (motrice et catégorisation). Les stimuli étaient des images d’ustensiles de cuisine et d’outils. Les résultats montrent que l’effet d’amorçage moteur (l’amorce et la cible impliquent un geste d’utilisation similaire) est préservé dans les trois groupes. L’amorce et la cible étant des stimuli visuels, l’effet de l’amorçage moteur provient de la composante motrice simulée. Un effet d’amorçage taxonomique existe également mais il reste dépendant de l’amorçage moteur et de la nature de la tâche. Dans la troisième expérience, les participants étudiaient le matériel (images d’ustensiles de cuisine et d’outils) dans trois conditions différentes : taxonomique, motrice et perceptive. Les résultats montrent que le bénéfice du traitement moteur à l’étude était avéré lors de la reconnaissance chez tous les sujets.
Ainsi, nos travaux suggèrent que la simulation de la composante motrice reste préservée chez les personnes âgées dans le vieillissement « normal » et « pathologique ».
La « réservaction », un nouveau concept au service du pouvoir d’agir des enseignants et des élèves
Jury :
Frédéric Saujat (AMU), directeur de thèse
Marie-Noëlle Roubaud (LPL-AMU), co-directrice de thèse
Nicolas Sembel (AMU), président du jury
Eric Flavier (Univ Strasbourg), rapporteur
Thierry Piot (Univ Caen), rapporteur
Laurent Lescouarch (Univ Caen), membre du jury
Entre pensée et langage, intention et action, le mouvement est bien sans cesse visé par les acteurs de la classe, Enseignant et élèves, pour faire apprendre et progresser. Qu’en est-il des élèves dits réservés, quelle est cette réserve et est-elle pertinemment objectivable ? Quelles décisions prennent les Enseignants pour faire et prendre la classe avec ces profils d’élèves et peut-on bien extraire des éléments objectifs de leurs gestes professionnels ? C’est tout l’enjeu du travail de recherche intitulé « la réservaction, un nouveau concept au service du pouvoir d’agir de l’Enseignant et des élèves ». En effet, pour mieux comprendre ce qui retient les élèves réservés mais aussi ce qui les décide à se montrer dans les apprentissages et le développement personnel, ces différents acteurs (Enseignants et élèves) ont été observés et questionnés, mis en dialogue avec eux-mêmes pour parvenir à mieux définir mais aussi mieux s’approprier les limites des freins et des leviers de passage à l’action visible. Ainsi, les dimensions énergie et affect bien visualisées dans les discours semblent montrer une amplitude moins forte pour le pouvoir d’agir alors que les dimensions positionnement et intellect présentent des marges de manœuvre plus larges. Ces analyses de l’activité permettent de confirmer les apports de ce nouveau concept de réservaction qui rallie des pôles jusque-là opposés: négatif et positif, retenue et engagement, discrétion et positionnement, interne et externe, et donc réserve et action.
Émergence et de médiatisation des controverses sociales à l’ère des réseaux socionumériques. Le cas de Bois Blanc (La Réunion) et de Tim Hunt (Grande-Bretagne)
Jury :
Romain Badouard (Examinateur, Univ. Paris II, Panthéon-Assas) Nicole D’Almeida (Examinatrice, Celsa, Univ. Paris-Sorbonne) Fidelia Ibekwe (Co-directrice de thèse, LPL-AMU) Bernard Idelson (Directeur de thèse, Univ. de La Réunion) Alain Kiyindou (Rapporteur, Univ. Bordeaux-Montaigne) Manuel Zacklad (Rapporteur, CNAM)
Cette thèse examine la manière dont les controverses sociales émergent et sont rendues publiques par les médias établis au prisme des réseaux socionumériques (RSN). Pour ce faire, nous avons entrepris une analyse de deux cas de controverses sociales : l’une, d’une ampleur médiatique locale, concerne une opposition de riverains contre un projet d’exploitation de carrière à La Réunion, l’autre, au rayonnement médiatique international, porte sur un mouvement pro-féministe à l’encontre des propos tenus par un scientifique britannique. La thèse mobilise cinq approches communicationnelles et sociologiques à savoir la médiation sociotechnique, les approches de la visibilité, la sociologie des problèmes publics, l’approche transplateforme et l’approche technodiscursive. Notre recherche repose sur une méthode d’analyse mixte, à dominante qualitative, d’entretiens semi-directifs et de traces numériques. Elle combine une analyse qualitative du contenu et du (techno)discours et une analyse quantitative lexicale et thématique du corpus de tweets et des articles d’information. Les principaux résultats démontrent que l’objet de revendication des groupes contestataires conditionne la dynamique des frontières numériques. D’autre part, la stratégie des acteurs, l’exploitation de leur capital relationnel et la configuration technique du RSN sont parties prenantes dans l’émergence et le maintien la mobilisation. Par ailleurs, nous constatons que les journalistes contrôlent l’accès à la scène médiatique après la phase d’émergence de la controverse. Enfin, les controverses sociales ne peuvent se départir des contextes sociopolitiques dans lesquels elles évoluent.
En raison de son haut niveau d’automaticité, l’écriture manuscrite apparaît particulièrement vulnérable à la maladie de Parkinson (MP). La dysgraphie dans la MP se manifeste par une diminution importante de la taille, de la vitesse et de la fluidité du mouvement. Construit autour de quatre études, ce projet de thèse a eu pour objectifs de caractériser la dysgraphie dans la MP aux niveaux comportemental et cérébral, et d’évaluer les effets de la musique de fond et de la sonification musicale dans la rééducation des troubles de l’écriture. Nous avons montré que l’analyse de la fluidité lors de la réalisation d’une petite spirale permet de mesurer précisément les effets de la MP et du traitement médicamenteux. Aussi, la vitesse de signature s’est avérée intéressante pour discriminer les participants des patients sous traitement. L’utilisation de la musique de fond a montré des effets notables sur les troubles de l’écriture d’un jeune enfant, alors que pour la dysgraphie dans la MP, son potentiel semble plus limité que celui de la sonification musicale. Afin de mieux comprendre l’effet d’un déficit des ganglions de la base sur l’écriture, tel que dans la MP, nous avons manipulé ses composantes séquentielle (enchainement de traits pour former les lettres) et d’adaptation motrice (déplacement du stylo selon des contraintes spatiales) lors d’une étude en IRMf. D’abord réalisée auprès de sujets jeunes, cette étude a permis de préciser le rôle fonctionnel des trois régions clés du réseau cérébral de l’écriture : le cortex prémoteur dorsal gauche, le lobule pariétal supérieur gauche et le cervelet droit.
La compréhension de l’ironie et des requêtes indirectes non conventionnelles chez des individus cérébrolésés droits et traumatisés crâniens : profils pathologiques, développement d’un outil d’évaluation et prise en charge
Sous la direction de Maud Champagne-Lavau (LPL) et Marion Fossard (Université de Neuchâtel)
Jury :
M. Philippe Allain - rapporteur du jury - Université d’Angers
M. Jean-Marie Annoni - rapporteur du jury - Université de Fribourg
Mme Laura Monetta - membre du jury - Université Laval, Département de
réadaptation, Québec
Mme Maud Champagne-Lavau - co-directrice de thèse - LPL (CNRS/AMU)
Mme Marion Fossard - co-directrice de thèse - Université de Neuchâtel
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En raison de la situation sanitaire, la soutenance de thèse se tiendra en vidéoconférence.
Les personnes intéressées à participer à la soutenance peuvent se connecter à partir de 14h30 sur le lien suivant : https://unine.webex.com/meet/elena.smirnova.
Nous vous remercions de bien vouloir couper le son.
Étude du système intonatif de l’anglais parlé à Dublin : focus sur les montées stylistiques
Jury :
Sophie Herment (AMU), Directrice de thèse
Daniel Hirst (AMU), Président du jury
Anne Przewozny (Toulouse Jean Jaurès), rapporteure
Sylvie Hanote (Poitiers), rapporteure
Cristel Portes (AMU), examinatrice
Stephan Wilhelm (Université de Bourgogne), examinateur
Cette thèse consiste en une analyse multidimensionnelle de l’anglais parlé à Dublin dans ses aspects sociolinguistiques, phonétiques et phonologiques et a deux objectifs majeurs : la description détaillée du système intonatif de l’anglais parlé à Dublin (et l’évaluation de l’influence de certains critères sociologiques) et l’étude approfondie des montées stylistiques que l’on peut retrouver à la fin des phrases déclaratives. Ces montées que l’on appelle HRT (High Rising Terminals) ou uptalk sont utilisées dans divers buts pragmatiques (comme la recherche de validation ou vérifier que l’interlocuteur suit bien la conversation) et sont présentes dans de nombreuses variétés d’anglais. Elles ont pour particularité de présenter des fonctions et des formes différentes en fonction de la variété où on les retrouve. Avec un corpus authentique de 31 locuteurs enregistré dans le cadre du programme PAC (Phonologie de l’anglais Contemporain, Durand & Przewozny-Desriaux, 2011) et du protocole PAC-Prosodie développé pour ces travaux, nous démontrons que Dublin a son propre système intonatif, qui est plus statique que celui de l’anglais britannique standard. Nous démontrons ensuite comment plusieurs critères tels que le genre et le niveau d’irlandais peuvent parfois expliquer la variation rencontrée à Dublin. Nous procédons ensuite à l’étude approfondie des HRT dans la ville, montrons que les femmes en réalisent plus et que ces HRT se distinguent des interrogatives et des continuatives principalement par l’augmentation de la courbe de fréquence fondamentale et par les fonctions pragmatiques. Enfin, nous exposons la façon dont ces montées et les locuteurs qui les produisent sont perçus en Irlande.
Afin de rendre compte de la manière dont les participants à une interaction construisent de manière conjointe et collaborative l’activité dans laquelle ils sont engagés, les différentes ressources disponibles aux locuteurs (syntaxe, prosodie, discours, geste) s’avèrent cruciales pour comprendre ce qui se joue. La méthodologie utilisée consiste à articuler l’approche de l’Interactional Linguistics qui consiste en une analyse séquentielle et détaillée des activités conversationnelles et l’approche dite corpus-based qui consiste à exploiter et interroger plus systématiquement et quantitativement des corpus de taille conséquente. Cette double approche permet à la fois de mettre à jour de nouveaux phénomènes linguistiques pertinents pour l’interaction conversationnelle à un niveau de granularité très fin tout en quantifiant certains aspects qui nous permettent de rendre compte d’une réelle systématicité des échanges. Parmi les ressources linguistiques utilisées par les participants, la prosodie constitue une dimension cruciale.
Nombreuses sont les études qui ont tenté de mettre en évidence les liens entre syntaxe et prosodie, ou bien encore entre discours et geste, mais mon projet vise à dépasser ces dichotomies afin de tenter d’intégrer les différents niveaux dans une approche linguistique large et unifiée, en vue d’aboutir à terme à une réelle théorie unifiée de la langue.
Le goût mais aussi l’exigence à effectuer des détours en vue de me confronter à d’autres questionnements posés par d’autres domaines sont au coeur de ma démarche (aller-retour entre modèles et données, linguistique théorique et linguistique de corpus, prosodie spontanée vs prosodie contrôlée, approche inductive vs hypothético-déductive en prosodie, etc). Ces « détours », bien que très coûteux en termes de temps car ils requièrent de se confronter à ce qui se joue dans les autres domaines, s’avèrent selon moi fondamentaux. En effet, ils permettent d’une part de révéler la complémentarité réelle existant entre les différentes disciplines, en l’occurrence les sciences humaines / sciences de la vie / informatique. Ils favorisent d’autre part de nouvelles pistes de recherche qui reposent sur des paradigmes et des méthodologies différentes qui permettent de relever de nouveaux défis. Ce projet s’inscrit dans un contexte national et international de plus en plus propice à ce type de recherche, en témoignent les travaux en neurolinguistique et les nouveaux questionnements autour des dialogues et de leurs corrélats neuronaux, regroupant des chercheurs issus de l’analyse des interactions et des expérimentalistes (cf les travaux de l’équipe de S. Levinson, la création de l’ILCB par P. Blache ou du réseau Cobra par N. Nguyen).