Apprendre à lire commence tôt : les bénéfices d’une exposition précoce à l’écrit

Nous avons le plaisir de vous communiquer le dernier article publié par Stéphanie Ducrot (LPL) en collaboration avec Jonathan Grainger (CRPN) dans Journal of Experimental Child Psychology :

Référence : Stéphanie Ducrot, Jonathan Grainger. The development of letter representations in preschool children is affected by visuomotor integration skills and visual field asymmetries. Journal of Experimental Child Psychology, 2025, 257, pp.106277. ⟨hal-05042015⟩

L’article en texte intégral : https://doi.org/10.1016/j.jecp.2025.106277

Résumé :
Être capable de reconnaître les différentes lettres de l’alphabet, quelle que soit leur orientation, est une compétence clé qui se développe à l’école maternelle. Quatre-vingt-un enfants de 4 à 5 ans ont participé à une étude longitudinale en oculométrie, au cours de laquelle ils devaient distinguer des lettres — présentées à l’endroit ou à l’envers (rotation à 180°) — de symboles géométriques. Les résultats indiquent que le développement des représentations des lettres chez les enfants d’âge préscolaire est étroitement lié à l’émergence d’un avantage du champ visuel droit, reflet d’un balayage attentionnel de gauche à droite. Cette latéralisation semble aller de pair avec la maturation des compétences d’orientation de l’attention et d’intégration visuomotrice. Nos données suggèrent que la consolidation des représentations orthographiques précoces dépend de ces compétences visuo-attentionnelles et visuo-motrices, elles-mêmes influencées par l’exposition à l’écrit et la pratique graphomotrice. D'un point de vue pratique, ces résultats soulignent l’intérêt, dès la maternelle, de renforcer les activités d’écriture manuscrite, en particulier lorsqu’elles s’accompagnent d’un entraînement perceptif ciblé sur les traits distinctifs des lettres et d’une exposition à des formes variées d’écriture. De telles pratiques pourraient favoriser l’encodage orthographique et faciliter la mise en correspondance graphème-phonème, étape clé dans l’apprentissage de la lecture.

Crédits d'image : Les auteurs

Comment notre cerveau traite-t-il la prosodie ? : Lumière sur l’implication du gyrus de Heschl

Une collaboration internationale de longue date entre James S. German (LPL/amU) et Barath Chandrasekaran (University of Pittsburgh) se concrétise au travers d’une étude pluridisciplinaire qui vient d’être publiée dans Nature Communications :

Référence : G. Nike Gnanateja, Kyle Rupp, Fernando Llanos, Jasmine Hect, James S German, Tobias Teichert, Taylor J Abel, Bharath Chandrasekaran. Cortical processing of discrete prosodic patterns in continuous speech. Nature Communications, 2025, 16 (1), pp.1947.

Article en texte intégral : https://www.nature.com/articles/s41467-025-56779-w
Article sur HAL : https://hal.science/hal-04973949v1
Communiqué EurekAlert (AAAS) : https://www.eurekalert.org/news-releases/1075245

Résumé :

Pendant des années, les scientifiques ont pensé que l’ensemble des aspects de la prosodie étaient essentiellement traités dans le gyrus temporal supérieur, une région du cerveau connue pour la perception de la parole. Grâce à l’analyse d’enregistrements intra-corticaux chez l’humain et le primate-non-humain (Macaque), cette étude révèle que le Gyrus de Heschl est une région corticale cruciale pour la perception de la prosodie qui traite les accents mélodiques en tant qu'unités phonologiques abstraites. Ces résultats informent les modèles neurolinguistiques du traitement de la prosodie en élargissant le rôle du Gyrus de Heschl dans le traitement de la parole au-delà des représentations de bas niveau suggérées jusqu'ici. Ils ont également des implications théoriques importantes pour la linguistique puisque que, conformément à ce qui a été proposé par la théorie auto-segmentale métrique, ils montrent que les accents mélodiques sont des catégories linguistiques de nature discrète.

Description des images 1 et 2
Crédits : Auteurs de l'article

La nature des représentations de la parole dans le « cerveau lettré » 

Nous avons le plaisir de vous annoncer le dernier article publié par Chotiga Pattamadilok (LPL) , Shuai Wang (LPL, ILCB) , Deirdre Bolger (ILCB) et Anne-Sophie Dubarry (CRPN). Cette étude a été réalisée à l'aide du système d'enregistrement EGI du Laboratoire Parole et Langage :

Référence : Chotiga Pattamadilok, Shuai Wang, Deirdre Bolger, Anne-Sophie Dubarry. Learning to read transforms phonological into phonographic representations. Scientific Reports, 2025, 15, ⟨10.1038/s41598-025-88650-9⟩.

Article en texte intégral : https://hal.science/hal-04975350v1

Résumé :
La capacité à comprendre la parole dans sa langue maternelle est considérée comme universelle. Cette hypothèse implique que les personnes lettrées et illettrées reconnaissent les mots parlés de la même manière. Notre étude apporte une nouvelle preuve neurophysiologique contre cette affirmation en montrant que les représentations de la parole stockées dans le lexique « phonologique » des lettrés sont contaminées par des traits orthographiques. Cette observation remet en question l'universalité des modèles de reconnaissance des mots parlés qui ont été construits exclusivement sur la base des résultats obtenus auprès de participants lettrés.

Crédits photo :
1) lil_foot_ / Pixabay
2) Dispositif EGI / LPL

 

Comment évaluer le risque de transmission de virus par la parole ?

Dès le printemps 2020, plusieurs membres du LPL et de l’hôpital La Conception ont travaillé sur les risques de propagation du virus SARS-Cov-2, notamment lors de la prise en charge des troubles de la déglutition ou d’une dysphonie. Sur la base de ces premiers travaux, l’étude SpeedVel a été financée et menée en collaboration avec des collègues de l’Institut Universitaire des Systèmes Thermiques et Industriels de Marseille pour analyser les gouttelettes émises en situation de communication orale afin de mieux évaluer le risque de contamination.

Nous avons le plaisir de vous annoncer que les résultats détaillés du projet SpeedVel viennent d’être publiés dans la revue Language Resources et Evaluation :

Référence : Francesca Carbone, Gilles Bouchet, Alain Ghio, Thierry Legou, Carine André, Muriel Lalain, Caterina Petrone, Antoine Giovanni. Investigating Droplet Emission During Speech Interaction. Language Resources and Evaluation, 2024 10.1007/s10579-024-09789-x. hal-04385770v2

Article en texte intégral : https://hal.science/hal-04385770

Résumé :
Les conversations (parole normale) et les interactions professionnelles (ex. parole projetée en classe) augmentent le risque d'exposition au SARS-CoV-2 en raison de la production de gouttelettes dans l'air expiré. Cette étude propose une approche expérimentale inédite pour analyser la production des gouttelettes dans un contexte communicatif, en tenant compte de différentes conditions phonétiques. Nos résultats montrent qu’une voix forte génère un flux d’air plus important et davantage de gouttelettes qu’une voix normale, validant ainsi une méthodologie intégrant de multiples mesures dans un contexte linguistique interactif.

Crédits d'images : SpeedVel / LPL

La texture des sons : Entendez-vous des sons rugueux ou des sons lisses ?

Le 20 novembre dernier, la revue JASA a publié un nouvel article sur l’association des sons à des formes et des textures, réalisé par un collectif de scientifiques internationaux dont Caterina Petrone (LPL-CNRS) et Susanne Fuchs (ZAS Berlin, actuellement Chaire Iméra/ILCB).

Selon les résultats de cette étude, le trille alvéolaire est perçu comme dentelé/rugueux par des locuteurs de langues différentes. Les chercheurs pensent que cette association pourrait être plus universelle que le célèbre effet bouba/kiki.

Référence : A. Ćwiek, R. Anselme, D. Dediu, S. Fuchs, S. Kawahara, G. E. Oh, J. Paul, M. Perlman, C. Petrone, S. Reiter, R. Ridouane, J. Zeller, B. Winter. The Alveolar Trill Is Perceived as Jagged/Rough by Speakers of Different Languages. J. Acoust. Soc. Am. 156, 3468–3479 (2024)

Lien vers l’article en texte intégral : https://pubs.aip.org/asa/jasa/article/156/5/3468/3321514/The-alveolar-trill-is-perceived-as-jagged-rough-by

Résumé :
La recherche typologique montre que dans toutes les langues, les sons [r] trillés sont plus fréquents dans les adjectifs décrivant des surfaces rugueuses que des surfaces lisses. Dans cette étude, cette recherche lexicale est complétée par une expérience avec des locuteurs de 28 langues différentes appartenant à 12 familles différentes. On a présenté aux participants des images d'une ligne dentelée et d'une ligne droite et ils ont imaginé passer leur doigt le long de chacune d'entre elles. On leur a ensuite présenté un trille alvéolaire [r] et une approximation alvéolaire [l], puis ils ont fait correspondre chaque son à l'une des lignes. Les participants ont montré une forte tendance à faire correspondre [r] à la ligne dentelée et [l] à la ligne droite, de manière encore plus cohérente que dans une étude interculturelle comparable concernant l'effet bouba/kiki.
La tendance est la plus forte pour la correspondance entre [r] et la ligne irrégulière, mais elle est également très forte pour la correspondance entre [l] et la ligne droite. Bien que cet effet ait été constaté avec des locuteurs de langues ayant des réalisations phonétiques différentes du son rhotique, il était plus faible lorsque le [r] trillé était la variante principale. Cela suggère que lorsqu'un son est utilisé phonologiquement pour créer des contrastes de sens systémiques, son potentiel iconique peut devenir plus limité.
Ces résultats élargissent notre compréhension des correspondances iconiques intermodales, en mettant en évidence des connexions profondément enracinées entre la perception auditive et le toucher/la vision.

 

Légende de l'illustration : Fig. 1 The oscillograms and spectrograms for the recording of (a) the alveolar trill [r] and (b) the alveolar lateral approximant [l]. The superimposed red line is the intensity curve with a range between 55 and 85dB. The jagged line (c) and the flat line (d) were the corresponding visual stimuli presented to participants in the experiment.

Crédits : Auteurs de l’article

Comment des espèces aussi éloignées que le chien et l’humain peuvent-elles se comprendre ?

L’institut Pasteur vient de diffuser un communiqué de presse sur l’étude menée par des chercheurs de l’Université de Genève, de l’Institut de l’Audition (Pasteur) et du CRPN Marseille en collaboration avec Thierry Legou (LPL), publiée en octobre dans la revue PLOS Biology :

Référence : Déaux EC, Piette T, Gaunet F, Legou T, Arnal L, Giraud A-L (2024) Dog–human vocal interactions match dogs’ sensory-motor tuning. PLoS Biol 22(10): e3002789.

Article en texte intégral : https://doi.org/10.1371/journal.pbio.3002789

Cette étude « révèle que le binôme se rencontre à mi-chemin de leurs différences pour communiquer ensemble. De leurs résultats, les chercheurs émettent l’hypothèse que les chiens et les humains se sont coadaptés pour pouvoir communiquer ensemble. La comparaison avec d’autres canidés non domestiqués par l’humain, comme les loups, permettrait de savoir quelles capacités linguistiques du chien sont dues à sa génétique et lesquelles sont dues à sa socialisation. »

 

Crédits : Thierry Legou, LPL

 

Etat de l’art des « ressources graduées » pour l’enseignement des langues étrangères

Nous avons le plaisir de vous annoncer la parution du dernier article de Núria Gala (LPL-AMU) en collaboration avec Thomas François du Centre de traitement automatique du langage (CENTAL UCL) dans International Journal of Applied Linguistics :

 Référence : Thomas François, Núria Gala. Graded resources for learning and teaching foreign languages. ITL - International Journal of Applied Linguistics, 2024, ⟨10.1075/itl.00024.fra⟩. ⟨hal-04697842⟩

 Article sur le site de l’éditeur (accès restreint) : https://dx.doi.org/10.1075/itl.00024.fra

Référence sur HAL : https://hal.science/hal-04697842

Résumé :
Des ressources innovantes pour l'enseignement du vocabulaire sont apparues au cours des dernières décennies, parmi lesquelles les « ressources graduées », c'est-à-dire des lexiques ou des inventaires dans lesquels les formes linguistiques ont été associées à un niveau de difficulté, en gardant à l'esprit le lecteur cible. L'idée de « grade » dans l'éducation n'est pas nouvelle et a évolué au fil du temps : les échelles de vocabulaire ou de texte (grades) ont été abordées comme un outil pédagogique avec les moyens disponibles à chaque époque. Dans cette étude, notre objectif est de montrer comment les approches actuelles des ressources graduées pour l'apprentissage des langues étrangères sont issues de listes de fréquences pour l'éducation. Nous synthétisons ensuite l'ensemble des travaux entrepris pour concevoir des ressources graduées, en mettant en évidence les différentes méthodologies appliquées ainsi que les ressources existantes.

 

Crédits : Image de freepik (éd.)

La prédiction d’événements chez les humains et dans les modèles de langue

Nous sommes heureux de vous annoncer un nouvel article publié par Philippe Blache (LPL) en collaboration avec des chercheurs de Hong Kong Polytechnic University (Projet Procore) et Purdue University :

Référence : James Britton, Yan Cong, Yu-Yin Hsu, Emmanuele Chersoni, Philippe Blache. On the influence of discourse connectives on the predictions of humans and language models. Frontiers in Human Neuroscience, 2024, 18, pp.1363120. ⟨10.3389/fnhum.2024.1363120⟩. ⟨hal-04717106⟩

Article en texte intégral : https://doi.org/10.3389/fnhum.2024.1363120

Résumé :
Cet article étudie la manière dont les humains et les modèles de langue traitent les prédictions d'événements dans les phrases, en se concentrant sur le rôle des connecteurs de discours tels que et, mais, et parce que. Les humains trouvent que les séquences de phrases congruentes sont plus faciles à comprendre, et ces connecteurs aident à clarifier les relations entre les événements, en particulier lorsque les prédictions doivent être inversées (par exemple, les concessives et les contrastives). L'étude a utilisé des stimuli d'histoires en italien et en chinois mandarin pour tester la plausibilité et la cohérence avec ou sans connecteurs. Les résultats montrent que les modèles de langue mandarine sont quelque peu sensibles à ces facteurs, mais qu'ils ont du mal avec les inversions de prédiction, tandis que les modèles italiens n'ont pas montré d'alignement significatif avec les données humaines.

 

Crédits d'image : Auteurs

Difficultés d’apprentissage de nouveaux mots chez les prématurés modérés de 18 mois

Dans sa rubriques des actualités scientifiques, le CNRS Sciences Humaines & Sociales met en lumière le dernier article publié par notre collègue Clément François, en collaboration avec Antoni Rodriguez-Fornells, Xim Cerda-Company, Thaïs Agut et Laura Bosch, dans une des plus prestigieuses revues sur le développement :

Référence : François C., Rodriguez-Fornells A., Cerda-Company X., Agut T., Bosch L. 2024, Impact of late to moderate preterm birth on minimal pair word-learning, Child Development.

Article en texte intégral : https://hal.science/hal-04671814

Communiqué du CNRS SHS : https://www.inshs.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/difficultes-dapprentissage-de-nouveaux-mots-chez-les-prematures-moderes-de-18-mois

Résumé court :
La prématurité impacte le développement précoce du langage. Qu’en est-il après une prématurité modérée à tardive ? Cette question est cruciale car les prématurés modérés représentent la majeure partie des prématurés dans le monde. Dans un article publié dans la revue Child Development, une équipe de recherche internationale aborde la question cruciale de savoir si la prématurité modérée à tardive a un impact négatif sur les capacités d’apprentissage associatif de nouveaux mots.

 

Crédits : Auteurs