Soutenance de thèse
Jeudi 9 septembre 2021 à 16h30
Fabio Ardolino
(LPL-AMU / Univ. di Pisa)
Variables socio-commutatives, attitudes psycho-émotionnelles et détails acoustique-articulatoires du parlé : une étude sur une communauté de locuteurs de français L2 originaires du sud de l'Italie
Sous la direction de Mariapaola d'Imperio (AMU) et Silvia Calamai (Univ. di Siena)
Jury :
Mme CHIARA CELATA - Univ. Urbino Carlo Bo
Mme ELISABETTA CARPITELLI - Univ. Grenoble
M. ORESTE FLOQUET - Univ. di Romà la Sapienza
Mme BARBARA GILIFIVELA - Univ. di Salento
Mme GIOVANNA MAROTTA - Univ. di Pisa
M. ALESSANDRO VIETTI - Univ. libre de Bolzano
Mme SILVIA CALAMAI - Co-directrice de thèse - Univ. di Siena
Mme MARIAPAOLA D'IMPERIO - Directrice de thèse - AMU
Résumé :
Les communautés de migrants représentent des laboratoires sociologiques uniques, dans lesquels des forces opposées poussent simultanément les individus à préserver leur patrimoine d'origine et à acquérir les particularités de leurs hôtes. Une renégociation similaire et dynamique des identités personnelles et sociales produit souvent des résultats imprévisibles, profondément liés aux contextes spécifiques dans lesquels ils se produisent. Dans le développement de tels processus, les faits linguistiques jouent un rôle crucial. La sélection des variétés de langue, la préférence pour des interlocuteurs spécifiques, les chemins suivis par l'acquisition de la langue et les phénomènes d'interférence sont des éléments fermement liés aux identités migrantes qui en résultent.
L'entrelacement entre la langue et la psychosociabilité dans les communautés de migrants représente certainement une question complexe, qui nécessite des recherches transdisciplinaires ; cela dit, les sciences humaines ne peuvent plus reporter une confrontation globale avec des questions similaires, étant donné l'importance croissante que les migrations à petite et grande échelle acquièrent dans les sociétés contemporaines (liquides, pour utiliser la définition répandue de Z. Bauman).
La recherche développée dans la thèse de doctorat ici présentée aborde précisément une question linguistique pertinente en fonction des processus sociaux migratoires. Plus précisément, l'étude s'est intéressée à la manière dont les attitudes sociales révélées par les migrants façonnent l'acquisition spontanée de la langue véhiculaire parlée par la communauté d'accueil : pour explorer ce sujet, un échantillon de 15 migrants d'origine italienne habitant l'agglomération d'Aix-Marseille (Provence) a été recruté, en accordant une attention particulière à la comparabilité des sujets en termes d'âge, d'éducation, de lieu de travail et d'origine linguistique. La phase de collecte des données repose sur une méthode globale, intégrant des méthodes psychométriques explicites et implicites répandues (questionnaires de Likert, et test d'association implicite) et la constitution d'un corpus oral représentatif du répertoire bilingue italien-français du participant concerné. Lors de la planification de la collecte du corpus, une attention particulière a été accordée à la possibilité de réutilisation la plus large possible de la ressource, également en dehors des domaines linguistiques et sociolinguistiques. Alors que le discours français a été obtenu en adoptant une méthode d'élicitation traditionnelle (description d'image), la collecte du discours italien repose sur un entretien semi-structuré et modulaire visant à recueillir les remarques, les croyances et les pensées des participants sur leur condition de migrant italien en France. Suivant des principes similaires, la ressource résultante (CoRital, Corpus Italiens à l'étranger) représente une source de données précieuse pour effectuer des recherches linguistiques, socio-psychologiques et historiques sur la migration franco-italienne contemporaine. Le corpus entier ( ~ 4h 50' de discours total, également réparti entre l'italien et le français) est transcrit orthographiquement, en adoptant la chaîne de transcription BAS (suivie d'un double contrôle humain). En ce qui concerne la question de recherche abordée par l'étude, l'analyse des détails phonétiques du discours collecté - effectuée au niveau des segments vocaliques spécifiques au français - révèle que les attitudes affectent différemment l'orientation native de l'acquisition de la L2, selon la dimension stéréotypée concernée (chaleur et compétence) et la nature explicite/implicite de la construction: des divergences acquisitionnelles similaires sont interprétées d'un point de vue sociolinguistique et psychosocial.